Jour 6 : Gare au loup (Pv Zhuang)

Pas besoin d’aller voir Eru pour que numéro 13 comprend qu’elle est dans un monde différent. Et pas seulement parce qu’elle était dans un milieu considéré comme hostile pour l’être humain. Les gens. Les gens étaient différents. Elle n’en avait pas rencontré beaucoup, soyons honnête, mais pour le moment, le changement lui semblait radical.

Oeuf sous le bras, elle se baladait de branches en branche, comme un petit singe, à la recherche de fruits et de nourriture. L’humanité avait beau être différente, il fallait toujours remplir les fonctions vitaux : oxygène, eau, faim.  Et pour ça, il faut admettre que numéro 13 se débrouillent superbement. Pas de chance. Seulement du bon sens et un instinct de survie développé et cultivé par des années de pratiques. D’ailleurs, elle se trouvait en face de drôles de pommes bleues quand cette aventure s’est déroulée. Après plusieurs vérifications, la jeune femme avait commencé à en ramasser quelques uns, en coupant la branche où il y en avait le plus avec son couteau, demandant plusieurs coups avant que le bois ne cède. Efficace et pas trop lourd.

Cependant, la nuit commençait à tomber et aussi bonne survivante qu’elle était, il était plus prudent d’être dans un endroit sûr. Et les hurlements de loups qui se faisaient entendre confirmait l’hypothèse. On pouvait être le plus fort de tous : face à une meute, on ne valait rien.

C’est en rebroussant chemin avec son oeuf et sa branche que numéro 13 tomba sur un drôle de spécimen : un petit homme avec un petit digimon rose. Elle s’arrêta un instant pour observer, ce drôle d’énergumène qui commençait à courir. Nulle doute qu’il était la proie des loups. Nulle doute qu’il n’aurait aucune chance, la loi de la nature est ainsi faîte.
Mais bon, les lois sont faites pour être brisés, surtout par quelqu’un qui ne croient qu’en un caillou.

Elle pose son butin et se met à poursuivre le petit garçon, toujours de branche en branche, gagnant aisément des mètres et dépassant rapidement la proie paniquée. Les sens à l'affût, elle chercha rapidement une solution pour extirper le gamin du chemin de la mort. Et il y en avait une tout trouvé. Une branche un peu basse et visiblement solide. Le gamin et sa bestiole allait passer en-dessous.

Tout se jouait à la seconde, mais le temps semblait ralenti pour la jeune femme, tant tout était calculé au millimètre près. Elle arrive sur la branche, pose son oeuf dotés d’épine avec laquelle elle court depuis le début, puis s’accroche à la branche grâce à la force de ses cuisses et se laisse tomber à la renverse, les bras tendus. Pile au moment où les deux se trouvaient en dessous. La poigne ferme, elle attrapa le gamin par le T-shirt et la bestiole rose par le sommet du crâne, puis, en serrant fort sur ses abdos, elle remonta avec les deux futures rescapés et se paya même le luxe de les poser plus en hauteur, afin que les feuilles les fassent devenir totalement invisible.

Numéro 13 attrape son oeuf et gagne des centimètres par rapport au sol pour bénéficier du camouflage naturel, avant que ses yeux ne transpercent ceux du petit garçon et de son ami, un doigt posé sur ses lèvres pour signifier qu’il fallait faire le silence. Du moins, s’il voulait vivre ce soir.

Le petit garçon ressemblait à un animal effrayé. Il avait reculé d’un coup, menaçant de tomber si la bestiole rose n’avait pas été là. Numéro 13 préféra regarder en bas et vit plusieurs animaux bleus passer en dessous. Ils étaient bien gros, les loups de cette jungle. Ne pas être pris pour cible semblait être une bonne idée, pour survivre dans cette forêt.

Enfin, le danger était passé. Numéro 13 commença à s’étirer comme un félin heureux, évacuant la tension inutile provoqué par le trop pleins d’adrénaline, puis le petit garçon s’adressa à elle, la faisant se remettre en position assise. Comme pour les digimons, elle fut surpris de le comprendre. Après tout, des humains asiatiques, elle en avait que rarement croisé, mais la technologie du digivice était merveilleuse et permettait une traduction exacte.

Une Ninja ? Numéro 13 pencha sa tête sur le côté, en signe d’incompréhension. Jamais entendu parlé de ce mot. Et on ne l’avait jamais désigné comme tel, même si sa rapidité et sa grande furtivité pouvait la confondre avec les récits de l’époque. Mafieuse ? Un peu plus courant, mais ça désignait surtout ses précédents maîtres. Sa tête pencha de l’autre côté. On l’avait toujours considéré comme une arme, jamais comme une personne.  

En le détaillant d’un peu plus près, le petit garçon lui semblait chétif. Jeunesse ou malnutrition ? Dans tous les cas, il allait avoir du mal à survivre ici. C’est triste. Et pareil pour son ami en rose. Enfin, était-elle mieux avec son petit oeuf ? On lui avait dit que c’était important, elle y faisait attention du coup. Comme une louve surveillant ses petits.

Souvent, les plus petits d’une race était ainsi parce qu’ils étaient les derniers à obtenir de la nourriture. Ah. Numéro 13 avait appris à se battre contre ses propres congénères pour avoir une belle part de butin. C'est donc dans un élan de générosité (ou de pitié) qu'elle attrapa un des couteaux de chasse qui était accroché à sa jambe et, d’un lancer précis, le plante juste devant le petit garçon avant de pointer le ciel avec son doigt de nouveau.

Enfin, pas le ciel. Plutôt quelques fruits étranges du digimonde qui se trouvait à quelques branches du petit garçon et de son ami.
C’est bien connu, il vaut mieux apprendre à pêcher que de donner du poisson.

Numéro 13 fit un petit oui de la tête. Le petit garçon et son ami étaient trop chétifs. Dans un monde civilisé, cette caractéristique ne poserait aucun problème, mais ici, ils avaient failli se faire manger tout cru par des gros loups. Alors, il allait falloir qu’il gagne un peu en muscle et un peu de poids. Et déjà, elle fut un peu surprise de voir la difficulté avec laquelle il avait de simplement retirer le couteau du bois. Elle ne l’avait pas planté si profondément que ça, si ? Bon, le principal, c’est qu’il y arrive.

Il se relevait avec l’assurance d’un faon qui venait de naître : tremblant et hésitant. Et après quelques galères, il avait enfin réussi. Quand on part de zéro, on peut dire qu’on fait des progrès quand on réussi quelque chose. La femme esquissa un tout petit sourire en le voyant si content, avant de récupérer son couteau d’un geste vif et précis, le remettant dans son étui de la même manière.

Numéro 13 se relève, son oeuf sous le bras et commence à grimper jusqu’au sommet de l’arbre, s’offrant un rapide point de repère. Sachant parfaitement où elle se retrouvait, elle redescend et revient au même niveau que les deux petits, les observant de son visage dénuée d’expression. De toute façon, elle n’avait qu’accordé un peu de répit à ces deux-là, s’ils se retrouvaient dans une situation fâcheuse de nouveau, ce n’est pas dit qu’elle serait encore là pour les en sortir. Ba. Les choses viennent et vont. C’est ainsi.

Bon, ce n’était pas tout, mais il était temps qu’elle retrouve sa branche avec ses pommes. De toute façon, les petits animaux semblaient trop effrayés par sa présence pour jouer un peu avec elle. C’est normal, la méfiance fait partie de la nature et elle n’a pas une apparence des plus rassurante. Peut-être la prochaine fois, s’ils se recroisent un jour. C’est souvent comme ça.

Dertien se lève, son oeuf contre elle, puis passe littéralement au-dessus du garçon et de son ami pour aller sur une autre branche, effectuant un petit bon agile. Les pommes étaient dans cette direction.